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jeudi 27 décembre 2012

CHÂTEAU DAMPIERRE







Image illustrative de l'article Château de DampierreH

CHÂTEAU DAMPIERRE  ****



Histoire

Le château actuel a été bâti sur l'emplacement d'un manoir construit au XIIIe siècle pour un cadet des sires de Chevreuse.
Brûlé pendant la jacquerie de 1358, il est restauré sous Louis XI pour le compte d'un notable parisien, Jacques de Thumery. Il est valorisé par la création en 1480 d'un étang.

Dampierre à la Renaissance

Dampierre est acquis en 1528 par Jean Duval, notaire et secrétaire du roi, devenu trésorier de l'épargne de François Ier, qui agrandit la seigneurie et l'étang et modernise le manoir. Celui-ci comprend désormais « plusieurs corps d'hôtel »5 agencés sur des voûtes trapues autour d'une cour, dans une enceinte de fossés, et un petit jardin à fleur d'eau du côté de la vallée de Chevreuse. Le logis présente un rez-de-chaussée surélevé compris entre l'étage des offices et les combles, avec façades crépies de chaux et de sable, pierres de taille en chaînage d'angle et briques pour former doubles bandeaux en parements de croisées, lucarnes, et souches de cheminées.
Du côté du village se trouve un pavillon d'entrée, équipé d'un pont-levis et de deux tourelles d'angle « garnies de canonnières »6. Dès 1550, l'ensemble sert de modèle à Pierre Seguier pour l'agrandissement de son château de La Verrière (disparu).
Le 16 février 1551, le cardinal Charles de Lorraine, archevêque de Reims et duc de Chevreuse, fait l'acquisition de Dampierre. De nouvelles dépendances sont édifiées en avant de l'entrée. Le peintre Francesco Salviati orne l'intérieur de fresques en 1554.
Du côté des jardins, au niveau des offices, le logis est prolongé de portiques interrompus par trois pavillons et développés autour d'un parterre. Ils s'inscrivent dans un vaste réseau de canaux, créé en 1555.
Dans Les plus excellents bastiments de France (1576-1579), Androuet du Cerceau consacre quatre planches à Dampierre. À l'angle antérieur gauche du château, il montre des arcs et des pilastres dans le style classique de la Renaissance qui couronnent l'ancienne tourelle d'un élégant belvédère et rythment une serlienne sur le pavillon contigu. Au fond de cette tourelle se trouve une étuve, représentée sur une planche de détail, qui semble une reproduction d'un dessin du Primatice qui a sans doute contribué à ces embellissements de concert avec Claude Foucques, architecte du cardinal de Lorraine7.
Sous le duc Claude de Lorraine (1578-1657), fils cadet de Henri Ier de Guise, duc de Guise, un corps de logis dit l'Astrée, ainsi dénommé car il est décoré de peintures inspirées du roman L'Astrée d'Honoré d'Urfé, est adossé à une aile des dépendances. À la même époque, il existe au bout de l'étang une île animée de cinq pavillons où aime à se retirer la célèbre duchesse de Chevreuse, née Marie de Rohan (1600-1679).

La reconstruction du château par Hardouin-Mansart

Château de Dampierre. Façade sur le jardin.
Château de Dampierre. Façade sur la cour.
Château de Dampierre. Façade sur le jardin.
En 1663, le château passe à Louis Charles d'Albert de Luynes (1620-1699), 2e duc de Luynes, fils issu du premier mariage de la duchesse de Chevreuse avec Charles d'Albert (1578-1621), 1er duc de Luynes, Connétable de France, favori du roi Louis XIII. Le château va dès lors rester dans la maison d'Albert.
À partir de 1675, le duc de Chevreuse, Charles Honoré d'Albert de Luynes (1646-1712), gendre du contrôleur général des finances de Louis XIV Jean-Baptiste Colbert, entreprend de moderniser Dampierre et fait appel à Jules Hardouin-Mansart qui devient Premier architecte du roi en 1681. Les travaux de Dampierre battent leur plein entre 1682, année où le roi annonce son installation définitive au château de Versailles, et 1684.
L'aile neuve des écuries est allongée en 1685. À la fin de 1688, le sculpteur David Bertrand s'apprête à décorer sur place des cheminées en stuc inspirées par la Renaissance italienne dont deux subsistent au premier étage8.
Après les travaux d'Hardouin-Mansart, le corps principal du château est agrandi, surélevé et rendu plus homogène, avec une distribution plus rationnelle. Les espaces de la cour intérieure et du petit jardin clos sont diminués et ce qui reste de ce dernier est remplacé par une terrasse à hauteur du rez-de-chaussée. L'architecte conserve les voûtes anciennes, ramène les douves à leur plan d'origine, remanie les tourelles d'angle sans les détruire et rhabille certains pans de murs. « Il a su marier les lignes de son architecture avec les composantes traditionnelles des parements locaux les plus réceptifs à la lumière (crépi ocre, brique, pierre de grès taillée). Enfin il a osé réinterpréter le jeu décoratif du double bandeau qui rappelle les châteaux du Val de Loire du XVIe siècle.
Côté parc, il a ajouté le perron et l'escalier majestueux qui franchit la douve. Du côté de l'entrée, il a ouvert la cour intérieure, comprise entre les ailes du logis, sur une cour d'honneur, bordée par deux longs bâtiments symétriques avec galeries à arcades en rez-de-chaussée. Derrière ces bâtiments et le village, il créa des dépendances. Enfin, il a précédé la cour d'honneur, bordée de balustrades, d'une avant-cour en pente douce, qu'introduisent deux légers pavillons entre des sauts-de-loup. »9
Entre 1742 et 1743, le duc Charles Philippe d'Albert de Luynes fait remplacer les cinq pavillons de l'île par de nouveaux bâtiments couverts à l'italienne, sans doute conçus par Jean Cailleteau dit « Lassurance le Jeune ». Le principal de ces pavillons a seul subsisté. Il était orné de très riches boiseries sculptées de médaillons sur la thème de la chasse et de trophées de musique, remontées vers 1850 dans le grand salon du château, sans leur lambris d'appui.
En 1758, le château reçoit une grille d'honneur en fer forgé créée par Louis-Adam Loriot.
En 1765, le duc Marie-Charles-Louis d'Albert de Luynes fait construire une orangerie au bout de l'Astrée et de l'aile voisine des dépendances, dans laquelle il fait remployer des pierres à bossages et des mascarons féminins du XVIe siècle, toujours en place.
En 1778, des têtes de chevaux et de cervidés dues à Ligier Richier sont incorporées à la façade noble des écuries.

Les transformations de Félix Duban

Le château de Dampierre traverse la Révolution française sans encombres. En très mauvais état en raison des dégâts causés par l'humidité, il est restauré à partir de 1839 par le duc Honoré Théodoric d'Albert de Luynes (1802-1867), numismate et archéologue, membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres. Celui-ci vient d'hériter la fortune considérable de son père, mais il n'est que l'usufruitier du château, transmis à son fils unique, encore adolescent.
Le duc fait appel à l'architecte Félix Duban qui fait avancer légèrement les frontons du château au-dessus des colonnes, mascarons, balcons en fer forgé et portes-fenêtres, recomposées en plein cintre au rez-de-chaussée. Le monogramme ducal y est inscrit entre des lions en bas-relief de Christophe Fratin.
La grande salle d'apparat du premier étage y gagne en hauteur et en éclairage grâce à une lanterne prise entre deux arcs doubleaux et deux parois cintrées au centre d'un plafond à voussures. Deux tribunes sont aménagées à ses deux extrémités, soutenues par des cariatides qui copient, avec la polychromie en plus, celles découvertes à Rome dans la villa d'Hérode Atticus. Elles soutiennent le décor néo-antique de la galerie, conçu pour abriter deux grandes peintures commandées à Jean-Auguste-Dominique Ingres dès 183910. Le maître en donne les sujets – « L'Âge d'or » et « L'Âge de fer » – et commence le premier au mois d'août 1843 mais le laisse inachevé en 1848 sans même avoir entrepris le second. Trois de ses élèves travaillent dans ce salon : Hippolyte Flandrin y peint des nus et des ornements pompéiens ; son frère Paul deux paysages opposés ; enfin le sculpteur Pierre-Charles Simart réalise quatre frises et dix bas-reliefs d'inspiration hellénistique entre 1841 et 1843. Les arceaux de la galerie sont ornés de petits bas-reliefs de Francisque Duret.

La "Minerve" de Simart.
De 1844 à 1855 sur les indications du duc, l'orfèvre Henri Duponchel exécute une tentative de restitution au quart de la statue chryséléphantine d'Athéna exécutée par Phidias pour le Parthénon, qui est est posée devant « L'Âge d'or » sur un socle en marbre de Carrare où Simart a sculpté une « Naissance de Pandore ».
Cet "exemple de polychromie sculpturale" exposé à l'Exposition Universelle de 1855 fut ainsi décrit par Théophile Gautier : "(...) La victoire que tient Minerve dans sa main et qui fait palpiter éperdument ses frissonnantes ailes d'or est la plus délicieuse statuette chryséléphantine qui se puisse rêver" (Maumené - op.cit., p. 351).
Le décor du vestibule du grand escalier d'honneur est revu en 1840-1841. Le plafond représentant « l'Abondance » entourée de quatre médaillons en grisaille est peint par Charles Gleyre tandis que les trois grands vases en trompe-l'œil sur les murs sont dus au pinceau de François-Édouard Picot.

Les boiseries de la chapelle voisine ont été sculptées par Jean-Baptiste-Louis Plantar sur des dessins de l'architecte du duc de Luynes Joseph-Frédéric Debacq. Les statues de la Vierge de la Nativité et des Quatre Evangélistes sont dues à Alexis-Hippolyte Fromanger.

Le "Louis XIII" de Rude.
En 1842 un des salons du rez-de-chaussée fut décoré pour recevoir une statue de Louis XIII en argent sur un superbe piédestal de bronze, commandée en 1840 à François Rude et exécutée avec le concours des fondeurs Eck et Durand.
"Aussi satisfait que l'artiste de cette oeuvre", le duc de Luynes lui remit 10 000 francs au lieu des 6 000 convenus, soit, en ajoutant la matière, la fonte et le piédestal une dépense totale d'au moins 65 000 francs, selon A.Maumené (op.cit., p.350).
Prêtée exceptionnellement en 1876 à l'Exposition organisée au profit des Alsaciens-Lorrains, elle y fut très remarquée; elle a été volée en 1985.

Architecture

Ingres L'Odalisque à l'esclave (1842), le jardin en arrière plan est inspiré du parc du château de Dampierre
Cette architecture révèle un style classique par la rigoureuse disposition des fenêtres, qui marque les étages, et par l'entrée monumentale, précédée d'un large escalier. La façade est ornée de colonnes et d'un fronton à l'antique.
Les fines boiseries de la salle à manger, attribuées au menuisier Bernard Toro, datent de l'époque Louis XIV. De nombreuses pièces ont été lambrissées sous Louis XV.
Dans la salle de musique est exposée l’Âge d’Or, une fresque peinte par Ingres au XIXe siècle.

En 1908 "la bibliothèque, une des mieux choisies qu'il y ait en France sur les sujets historiques occupant toute une aile de la grande cour, contient 18 500 volumes, notamment des lettres autographes de Louis XIV et de Colbert, un Coran manuscrit, don de Soliman Pacha, une Bible du XIIème siècle, deux livres d'heures du XVème siècle, deux manuscrits du calligraphe Jarry, chargé par le duc de Montausier d'écrire la Guirlande de Julie, et de très précieuses archives familiales (...). Enfin des collections d'histoire naturelle, principalement de géologie, sont disposées dans la salle de l'Astrée. Les magnifiques collections de Dampierre ont toujours attiré l'attention des artistes et des critiques d'art" (Maumené, op. cit. p 351).

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