1 - Le
château de Maulnes, dans l'histoire du Tonnerrois
Sur les finages de Cruzy -et
précisément au centre géographique de l'ancienne seigneurie- une forteresse
féodale, siège du fief de Maulnes, fut érigée, sans doute vers la seconde moitié
du XIe siècle. Au IXe siècle, le domaine de Maulnes était la possession du comte
Gérard de ROUSSILLON. Vers 984, le fief passa dans le comté de Tonnerre. Le site
abrita par la suite une maison forte qui servit de rendez-vous de chasse et
accueillit les ducs de Bourgogne -et notamment Philippe le Hardi, en septembre
1374- qui ne dédaignaient pas venir à Maulnes « découpler » dans l'immense forêt
avoisinante, afin de « laisser courre » sur les cerfs, sangliers et autres bêtes
fauves qu'elle abritait.
En lieu et place de l'antique
forteresse médiévale, une demeure plus accueillante fut édifiée entre 1562 et
1570, à l'époque de la Renaissance, par l'architecte Androuet du Cerceau, à la
demande d'Antoine de CRUSSOL, devenu comte de Tonnerre en 1556, par son mariage
avec Louise de Clermont. Jean FROMAGEOT indique que « le vieux château fut rasé
et la nouvelle construction élevée autour de la source, devenue point central de
l'édifice »(54) . Nous reviendrons sur cette particularité
de la source qui représente, avec le plan de l'édifice, une singularité
remarquable et, en quelque sorte, le support du récit légendaire.
L'isolement et l'étrangeté du site ont probablement contribué à alimenter le
mythe de Mélusine. En préambule à son étude sur Maulnes, Albert LARCHER renforce
le trait dans une description poétique, au demeurant assez juste : « Un plateau
balayé par les vents. Dominant l'immensité désormais dénudée, la forteresse
impressionnante du vieux château qui dresse sa masse altière ! Elle semble
défier et l'espace qui l'entoure et le ciel noir qui l'opprime, et l'orage qui
l'insulte et le soleil qui la brûle !
»
De fait, on aperçoit de loin ce château aux formes
un peu curieuses, installé sur un plateau élevé. Venant de Tonnerre par la
petite route départementale n° 452, on le découvre depuis la localité de Villon.
A l'opposé, lorsqu'on emprunte la route nationale n° 65, conduisant de Tonnerre
à Châtillon-sur-Seine, le château est bien visible depuis les environs de
Pimelles.
Il n'est pas jusqu'au toponyme qui en appelle à
cette singularité. Le nom même de « Maulnes », selon Maximilien QUANTIN,
apparaît dans l'histoire pour la première fois, en 1293, sous la forme « Maulna
». On note ensuite successivement les formes suivantes :
• « Maune », en 1305,
mentionnée dans le Cartulaire de l'Hôpital de Tonnerre,
« L'histoire de Mélusine est aussi racontée avec cette
variante : Mélusine était la femme d'un seigneur qui était très fier de la
beauté de sa dame.
Une seule chose traversait le bonheur du châtelain, c'était qu'à un certain jour
de l'année, Mélusine se faisait invisible pour tous, même pour lui.
Vainement la suppliait-il de lui faire connaître la cause de cette retraite.
Mélusine ne répondait que par des larmes. Obsédé par des sentiments de toutes
sortes, un jour ce seigneur résolut de découvrir à tout prix le mystère.
II pénètre secrètement dans l'habitation de sa femme, et au moyen d'une fente
pratiquée dans la porte, plonge le regard dans la chambre où était la
châtelaine.
Mort et enfer ! qu'aperçoit-il ? Mélusine ayant toujours, de la tête à la
ceinture, sa beauté divine de femme, présente, dans le reste de son être, la
forme d'un hideux serpent.
A cette vue le seigneur jette un cri. Mélusine, qui l'entend, est si courroucée
et si honteuse d'avoir été surprise en cet état qu'elle pousse à son tour une
clameur qui fait trembler le château et la forêt, et se précipite dans un puits
où elle trouve la mort.
A partir de ce moment, on la voit encore, de fois à autre, sous cette apparence
de demi-métamorphose. Mais elle a voué une haine mortelle aux maris trop
curieux, qu'elle punit d'une manière terrible ».
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